mardi 8 novembre 2011

Travail-famille, de nouveaux champs de réflexions

Après avoir voulu « articuler l’école et l’entreprise» (en 2001), Bernard Fusulier s’est penché sur «l’entreprise et l’articulation travail/famille ». En 2008, il publiait une étude réalisée auprès d’entreprises wallonnes qui tirait un bilan de la façon dont les organisations intègrent cette problématique. Avec « Articuler vie professionnelle et vie familiale », qui vient de sortir aux Presses universitaires de Louvain, le professeur de sociologie de l’UCL poursuit sur sa lancée, mais en abordant des terrains inexplorés. Beaucoup de choses ont été écrites sur les politiques publiques visant à aider chacune et chacun à gagner sa vie tout en prenant soin de sa famille. Des mesures comme le crédit temps, la pause carrière ou le développement de crèches et autres haltes-garderies permettent de dépasser le modèle traditionnel du « mâle qui va gagner le pain » et favorisent l’insertion des femmes dans l’emploi. Mais ces politiques ont leurs limites, quand elles n’entraînent pas des effets pervers comme la dévalorisation du travail domestique ou le renforcement des inégalités hommes/femmes. Bernard Fusulier et son équipe ont donc interrogé l’influence que peut avoir l’environnement professionnel sur cette APF, au départ de l’étude de trois professions : infirmier(ère)s, policiers, assistants sociaux. En bref, les infirmières ont le plus de difficultés à concilier travail et famille et se sentent peu soutenues. Elles recourent souvent au temps partiel. Le temps plein est la norme chez les policiers, mais des arrangements informels permettent de prendre en charge des questions privées au travail. Quant aux assistants sociaux, ils recourent aussi au temps partiel, mais avec plus de soutien interne. Cette analyse brouille davantage nos repères qu’elle ne donne de réponses nouvelles. Mais ce faisant, elle ouvre de nouveaux champs de réflexions, et des pistes, qui intègrent l’aspiration des personnes et donc la qualité de l’emploi et le dépassement du clivage hommes femmes.

Fusulier B. et. al., 2011, « Articuler vie professionnelle et vie familiale. Étude de trois groupes professionnels : les infirmières, les policiers et les assistants sociaux », PUL, Louvain-la-Neuve, 250 pp.

Les Roms, d'une misère à l'autre

Le lundi 19 septembre 2011, sur ordre de la bourgmestre de Schaerbeek, 47 Roms ont été évacués de la gare du Nord. Après un vain détour par Bruxelles-ville, ils ont trouvé refuge sur la place Gaucheret, toujours à Schaerbeek, à l’abri des voitures, mais pas des intempéries. Une semaine plus tard, ils étaient 72 femmes, hommes et surtout enfants en bas âge. La plupart de ces personnes sont originaires d’un pays de l’Union européenne. Présentes sur le territoire belge depuis moins de trois mois, elles étaient considérées comme des «touristes» et n’avaient droit ni à l’aide sociale, ni à l’accueil. Dans l’urgence, le CPAS leur a néanmoins délivré colis alimentaires et premiers soins. Le 5 octobre, le Foyer schaerbeekois a réussi à mettre un bâtiment en attente de rénovation à disposition. Pour raisons juridiques, la bourgmestre a dû délivrer un ordre de réquisition en attendant la conclusion d’une convention d’occupation précaire. Cette solution n’est donc que provisoire. Après les trois mois, ces Roms peuvent faire une demande d’asile à l’Office des Étrangers. Mais, vu la jurisprudence récente, il y a de fortes chances que le Commissariat aux Réfugiés rejettera leur demande au terme de la procédure. Ils se retrouveront à nouveau dans l’illégalité et sans ressources. Sans une politique spécifique pour les Roms, construite par tous les niveaux de pouvoirs, à commencer par l’Europe, ces familles, comme 12 familles slovaques et tchèques contraintes de squatter un immeuble désaffecté à Ixelles depuis le mois d’août, et comme tant d’autres familles à venir, continueront à fuir la misère pour une autre misère.

Photo Belga